L’art d’avoir toujours raison (ou comment être élu dans une démocratie)

Jordan Bardella. Marion Marechal Le Pen, Emmanuel Macron, En Marche, Europe Ecologie, PS, Divers Gauche, La France Insoumise, Jean Luc Mélanchon, Olympe de Gouges, Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac, François Mitterand, Georges W. Bush, Olivier Véran, Julie Graziani ,

Une “formation” sur la démocratie qui vous fera rire… et réfléchir longtemps

Oubliez le rideau rouge, les personnages, l’action dramatique : ici, vous êtes convié·e·s à une formation professionnelle. Sujet du jour ? “Comment être élu dans une démocratie”. Rien que ça.

Sur scène : deux pupitres, deux ordinateurs, deux écrans géants, un chronomètre bien visible et deux animateurs aussi rigoureux qu’enthousiastes. Tout est cadré, minuté, et surtout, documenté. Dès les premières minutes, le ton est donné : une conférence parfaitement huilée, appuyée sur des slides bourrés de courbes, de statistiques, de verbatims, d’études linguistiques et d’enregistrements audio authentiques. Du PowerPoint à haute intensité intellectuelle, mais version satire mordante.

Et ça fonctionne.

Avec un sérieux imperturbable et une complicité presque troublante, le duo alterne démonstrations brillantes, digressions savoureuses et éclats de lucidité féroce. On y apprend à décoder les affiches de campagne, à reconnaître les euphémismes, à détecter les sophismes et à comprendre les mécanismes de “triangulation” – cette fameuse technique qui consiste à dire ce que tout le monde veut entendre, sans jamais rien dire vraiment.

Mention spéciale à l’une des perles du programme :

“Une promesse fausse à laquelle tout le monde adhère vaut mieux qu’une promesse juste que tout le monde rejette.”

Un concentré de cynisme… terriblement efficace.

Mais sous le vernis comique, une autre émotion s’installe peu à peu : l’inquiétude. Car tout ce que l’on voit et entend est vrai. Les textes sont extraits de discours politiques authentiques, les analyses s’appuient sur de véritables travaux de recherche en rhétorique, sciences politiques et communication. L’effet est saisissant : on rit à gorge déployée, mais on en ressort glacé.

Car au fond, la question que pose la pièce est vertigineuse :

Et si tout cela n’était pas une farce ?

Et si, sans nous en rendre compte, nos votes étaient manipulés par des discours finement calibrés, des promesses creuses, des techniques oratoires maîtrisées jusqu’à l’absurde ?

Le clou du spectacle ? Un faux diplôme remis au public en fin de séance. Vous voilà désormais certifié·e dans l’art d’avoir toujours raison. À vous d’en faire bon usage — ou pas.

Un théâtre d’utilité publique

Avec L’art d’avoir toujours raison, le théâtre devient un miroir féroce de notre époque politique. À la fois satire hilarante, cours magistral et performance d’utilité citoyenne, cette pièce bouscule autant qu’elle éclaire. On en sort diverti, désabusé… et étrangement plus lucide.

Alors, après avoir vu cette “formation”, irez-vous voter différemment aux prochaines élections ?

Maxime (correspondant culturel Le Bruit du Off & Baz’Art)

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