Carolina ne chante pas, elle incendie la scène – et dans Différente, c’est tout un cabaret en flammes qu’elle nous livre, entre éclats de rire et frissons d’émotion.
Carolina. Rien que ce prénom suffit à éveiller la curiosité, à faire frissonner l’échine des amateurs de music-hall, à rappeler aux âmes sensibles qu’une diva peut encore enflammer la scène avec panache, dérision et émotion brute.
Dans « Différente », Carolina — diva peroxydée à la frange rouge aussi incandescente que son tempérament — nous offre bien plus qu’un spectacle : une immersion dans un univers éclatant, burlesque et profondément humain. Carolina est une star. Une star internationale, ou presque. Peut-être. Mais dans son cœur et sur scène, elle l’est indéniablement.
Avec une aisance désarmante, elle préfère chanter que parler. Et c’est tant mieux ! Ses reprises vibrantes de Dalida, Aznavour, Lucienne Delyle ou encore Annie Cordy sont autant de fenêtres ouvertes sur son âme. Elle ne copie pas : elle s’approprie. Elle incarne. Elle explose. Carolina vit les chansons comme on vit une histoire d’amour : avec fureur, passion et tendresse. On sent chez elle une admiration viscérale pour Dalida, presque une filiation spirituelle. D’ailleurs, l’idée que Dalida elle-même lui ait demandé de chanter ainsi n’est pas si folle… dans l’univers onirico-déjanté de Carolina, tout devient plausible.
Sa silhouette flamboyante — robe rouge et noire, paillettes, port altier — évoque avec force la Marisa Paredes de Talons aiguilles. Carolina irradie, tel un soleil parfois cruel, souvent drôle, toujours magnétique. Comme la muse d’Almodóvar, elle est à la fois tragédienne et clownesse. Une femme forte, en pleine lumière, dont les échecs sentimentaux affleurent sous les strass comme autant de fêlures sublimes.
Le public rit, chante, tape des mains. Il vibre au rythme de Carolina. Et quand elle fusille du regard son pauvre partenaire, punching-ball de son égo blessé, c’est l’art de la tragicomédie qui éclate. Elle le bouscule, elle nous bouscule, avec cette autodérision grinçante qui n’appartient qu’aux grandes.
Mais derrière le cabaret, le clinquant, la posture, il y a une femme. Une femme singulière, provocante, libre. Une femme qui, dans une ultime chanson déchirante dédiée à son père, tombe le masque. Et soudain, le rire s’étrangle, le cœur se serre. On est touché. Profondément.
Cerise sur le gâteau : le spectacle va bientôt partir en tournée… en Espagne ! Un signe qui ne trompe pas. Quand un show aussi singulier, aussi français dans son ADN, franchit les frontières, c’est qu’il a ce petit supplément d’âme, cette flamboyance universelle qui touche partout.
« Différente » est une ode à la chanson populaire, une lettre d’amour au music-hall, une performance incandescente d’une grande dame à la voix qui fend le silence. Carolina est drôle, excessive, insupportable, bouleversante. Carolina est inoubliable.
Un seul conseil : courez-y. Et ressortez vos vieux vinyles…
Maxime (correspondant culturel Le Bruit du Off & Baz’Art)
Théâtre 3S. Le quatre – 20h50
Du 4 au 26 juillet. Relâche les 7, 14, 21 juillet.
Compagnie : M-A.S Productions
Auteur : Miguel-Ange Sarmiento
Mise en scène : Rémi Cotta